08 : 03 : 09

Palmade malade, public barrique

Quelle idée m'a pris ? Hier, pour m'aérer, j'ai acheté à mi-prix au kiosque de la Madeleine un strapontin pour découvrir la dernière pièce de Pierre Palmade. C'est un peu banal, mais je me déplace soit pour m'emplir d'un spectacle ou une mise en scène qui m'intéresse, soit pour voir "à cru" des acteurs qui me touchent (Madeleine Renaud, Philippe Noiret, Christine Murillo, Michel Bouquet, Jacques Villeret, Muriel Robin, Roland Dubillard, Jacqueline Maillan, Laurent Terzieff...) Palmade, bizarrement, me semble sous-employé.

Dans un jeu schizophrénique très caractéristique des acteurs en général et des comiques en particulier, il met en scène ses angoisses et son alcoolisme dans sa dernière composition, très border-line. Il apparaît alors sur scène, maigre, hâve, la voix brouillée, parfait pour le rôle de vedette qui oublie ses nuits et subit ses jours. Jusqu'à ce que le rideau se ferme brutalement au bout de dix minutes, pour ne plus rouvrir. Les pompiers arrivent.

Je suis alors sidéré par l'attitude consommatrice, indifférente du public. Face à une personne qui montre/vit tripes à l'air, tout le monde rigole dans un grand brouhaha. Personne n'a l'idée simple de se mettre à sa place. On parle dîner, remboursement, redémarrage de la pièce. Comme au cirque romain, il faut que le comique crève sur scène dans un effet heureux.

A rebours --et sans tomber dans les larmoiements convenus sur l'angoisse de celles et ceux qui doivent faire rire tous les soirs--, voilà tout de même une leçon sur la versatilité et la cruauté des groupes. Vraiment --croyez-le-- pas un individu pour songer au drame intime d'un être humain perdu. Même ma compagne. Et la notoriété, suscitant envie, devient facteur d'indifférence aggravant.

Voilà pourquoi je me fais un point d'honneur à ne jamais me faire rembourser ce billet pour quelqu'un qui a donné, au-delà du possible, son âme d'un soir.

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06 : 02 : 09

Le retour du local

 

Crise du système ou crise de système ? Rafistoler ? Notre nouveau monde est micro-macro. C'est-à-dire que l’individu peut s’adresser au global directement et, inversement, les questions globales ont des influences rapides sur les individus les plus isolés : temps d’ubiquité. Alors, nous avons craint, à juste titre, les conséquences d’une uniformisation des modes de vie. Ce fut plutôt le nivellement d’une consommation écervelée, mue par les seuls intérêts financiers de quelques-uns.

La structuration par le haut est devenue une réalité, même si elle est peu cohérente. Elle constitue une nécessité impérieuse cependant, à condition de s'organiser, pour éviter notamment les périls environnementaux mais aussi des conflits en chaîne. Elle ne pourra cependant se réaliser –tous s’en rendent compte désormais-- que grâce à des pensées multipolaires, des conjonctions de points de vue. Ceux qui déduisaient de la mort du communisme, l’Empire des Etats-Unis se sont trompés. Finalement, communisme et capitalisme proposaient des structurations autoritaires, l’un dans une version bureaucratique, l’autre par l’hyper-puissance d’entreprises mondialisées. Aucun de ces modèles n’est durable. Aucun n’est juste. Aucun n’est acceptable.

Le moment n’est-il pas venu alors de concevoir que l’échelle d’action doit redescendre vers le très local ? Si l’individu se montre au global, les individus concertés –à portée de vue, en vue directe—sont capables de repenser hic et nunc leur organisation et leurs modes de vie. Le temps n’est plus d’importer à Bezons des pommes de Chine, à Cayenne des poulets de Bretagne, du riz au Cameroun. Les ressources locales, les possibilités vivrières sont à reconsidérer. Les économies solidaires devraient commencer par favoriser ce qui ne nécessite aucun déplacement.

C’est aussi au niveau local que les économies d’énergies, que des solutions inventives d’habitat sont à penser (ou à repenser). La diversité culturelle est là : imaginer en fonction des désirs et des conditions géographiques. Pourquoi construire la même chose partout sur la planète ? Cela n’a aucun sens ni pratique ni culturel. C’est encore au niveau local que des économies éthiques et des entreprises éthiques sont à concevoir. La question n’est ni le marché (souvent nécessaire), ni le profit, mais l’organisation de l’entreprise et l’utilisation des bénéfices. Des micro-marchés peuvent se mettre en place et des interventions d’individus sont susceptibles d’encourager ou condamner des pratiques au nom du devenir commun.

Alors que la tendance fut –à l’ère télévisuelle des mêmes images pour les masses—d’uniformiser les contenus pour consommateurs passifs, à l’ère d’Internet –celle de la multidiffusion, où l’un parle potentiellement au tout—il est donc temps d’un réveil individuel et collectif. La prise en mains de sa situation locale n’est d’ailleurs pas forcément la perpétuation de ce qui est (la survie d’une usine polluante) mais une vraie réflexion sur le vivre ensemble, aujourd’hui et demain, une "poétique" au sens d'Edouard Glissant ou de Kenneth White.

Il en découlera forcément le disparate. C'est-à-dire que le morcellement et l’émiettement favoriseront, avec des volontés d’autarcie,  les replis communautaristes. Voilà pourquoi un pacte commun évolutif est nécessaire. Il doit donner conscience à chacun de participer aux mutations d’une planète, chacun responsable du tout. De plus, ce mouvement redonnera espoir, volonté, fantaisie, à des individus qui peuvent maîtriser les conditions de leur quotidien.

Les excès de la globalisation furent en effet, plus encore que l’uniformisation générale, la déresponsabilisation, la construction de sociétés d’exécutants à qui était expliqué qu’il ne pouvait y avoir aucun autre mode de vie ni de pensée, médicalisés dès qu’ils se montraient inadaptés. La reprise en mains de l’initiative locale, l’imagination autour de soi, restent pourtant des leviers puissants de créativité, individuelle et collective.

Ils supposent la réévaluation du savoir et de la recherche. Seul le savoir permet en effet d’avoir des éléments d’appréciation pour choisir (et changer). Seule la recherche, et ses méthodes expérimentales, offrent des perspectives contradictoires et critiques. Les deux nous expliquent l’erreur parallèle du modèle unique --normalisation et robotisation--, et de l’explosion en autant d’égoïsmes, pragmatiques ou non : ni standardisation, ni protectionnisme, plutôt protection et circulation. Et pensées comparatistes, économies diversifiées, vraies consciences micro-macro.

C’est donc bien à une inversion des priorités et des valeurs que sous-tend l’évolution de ce monde : regarder en bas, regarder autour de soi, pour construire ensemble le tout. Les individus planétaires, pleinement conscients de la relativité, peuvent mettre en œuvre une vraie écologie culturelle pour diversifier la diversité en bâtissant un univers global évolutif. Changer ici pour dialoguer partout.

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29 : 01 : 09

Au Rêve : fermeture

2009 : Au Rêve est fermé. Eliette s'est enfuie. C'était le seul bar où je donnais des rendez-vous. Je suis triste, comme après la mort de Prévert ou de Péret. Cestac et Teulé évoquent ce lieu au pied de la statue de Steinlen dans leur poignante bande dessinée sur Charlie Schlingo, Je voudrais me suicider, mais j'ai pas le temps. J'avais rencontré Schlingo avec Choron mais ne me doutais pas de l'immense iceberg immergé. R. L. me signale que ce 89 rue Caulaincourt fut l'adresse de Jean-Pierre Duprey, poète surréaliste (Derrière son double), qui s'est pendu le 2 octobre 1959 à 29 ans, après avoir pissé sur la tombe du soldat inconnu pour protester contre la guerre d'Algérie (puis passé à tabac). Lourd 89...

Ca plombe. Le XXe siècle se referme. Eliette fatigait des bobos. Schlingo ne s'était nulle part senti à sa place. Duprey fit éclair.

Pendant ce temps --est-ce cela l'actualité ?-- ça défile et ça pérore à Davos. Certains veulent rafistoler un capitalisme fusillé par son échec moral et environnemental. D'autres, qui me font autant frémir, ne songent qu'à des bureaucraties injustes et des dictatures idéologiques. Le problème n'est pas le marché mais l'éthique des entreprises et la mobilisation des consommateurs.

Le Rêve est absurde, certes. Le Bonheur est une petite mort. L'Utopie doit réintroduire le mouvement, l'innovation. Et la poésie s'invente entre désespoir, rages, rires, plaisirs et éclairs. Salut Charlie. Salut Eliette. Salut Duprey.

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27 : 01 : 09

Filtre-Vert / Green-Filter

Il est plusieurs sens au mot filtre, dont celui d'écran de lumière. Les lunettes nous évitent tous les éblouissements.

Micro-macro : réveil de l'action ici et structuration générale. Lunettes vertes / Green Glasses. Tout repenser au quotidien. Et s'amuser. Garder l'esprit critique, la fantaisie.

L'artiste d'origine togolaise, Yao Metsoko, a réalisé pour le Musée du Vivant (premier musée international sur l'écologie et le développement durable, que je dirige dans la grande école AgroParisTech), cette sculpture : Femme-éléphant. Elle exprime le lien indissociable dans les sociétés animistes entre humains-faune-flore-minéraux-cosmos. L'environnement est un tout. Obama est-il resté assez africain ?

Ce poster fait partie d'une série de 6 qui viennent d'être édités avec 8 cartes postales grand format. La télévision en ligne ecolibtv s'ouvre (et va se développer). Le 5 février, une campagne de presse appelle à "sauver la mémoire visuelle de l'écologie" et sert à remercier pour toutes les donations très importantes reçues (René Dumont, les Verts, le Réseau mémoire de l'environnement, et tant d'artistes, photographes, dessinateurs, affichistes, vidéastes...) Le 17 février s'ouvre à Ivry-sur-Seine l'exposition itinérante La nature et vous. Histoires d'écologie avec projection d'un de nos films. De la biodiversité... (Guyane), De l'eau... (France), De l'arbre... (Maroc), ces trois documentaires vont être proposés partout (demandes déjà pour Le Caire et Shangaï) avec possibilités d'expositions.

Le journal Le Monde a d'ailleurs salué (3 mars 2009) cette "collection sans équivalent au monde". Merci.

Bref, ça bouge. Faut secouer les consciences et entrer résolument dans une planète nouvelle. Ou de l'utilité de la crise.

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03 : 01 : 09

Brouillard et purée de pois

Les débuts d'année sont comateux. On s'arrête et c'est sur du verglas. On regarde devant soi et c'est la purée de pois. Le monde est en attente, dans la brume. J'ai appelé cela la Drôle de paix. Il y en a qui en profitent pour chauffer la guerre à Gaza, des fois qu'on n'aurait rien remarqué. Dans l'hiver, sous le pont transbordeur de Marennes, j'ai écrit Un monde micro-macro. Penser l'ubiquité et la disparité. C'est un petit livre rassemblant humeurs et analyses prospectives. Cela ne se fait pas. Mais bon. On verra pour le papier plus tard. Il éclaire ce site de contenu supplémentaire (allez voir "livres on-line"). Nécessité impérative de pensée durable dans l'obsolescence et l'inquiétude actuelles. Je poursuis pas à pas trente ans de réflexions et quelques saines colères dans le consensus mou et l'aveuglement.

A chacune et chacun de relayer, partout. Merci.

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18 : 12 : 08

Salon des Indépendants 2008

Le Grand Palais a un petit air rétro. Le Salon des Indépendants vient d'y rouvrir. Souvenez-vous, vous passiez en revue des centaines de croûtes, à n'y plus pouvoir repérer un Vermeer, même pour l'oeil le plus exercé. Pataphysique en diable : du n'importe quoi, le confusionisme abouti. Eh bien, c'est pareil aujourd'hui, en version projections, pour faire mode et beaucoup plus cher. Notre nouvel artiste officiel n'est plus Yves Brayer mais Alain Fleischer, créateur d'Etat subventionné à vie, comme certains théâtreux.

Je propose le retour de Staline pour parfaire le décor.

Furieusement Fifties !

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17 : 12 : 08

Economie-croyance et drôle-de-paix

Je reviens (-17) du Canada et rapporte l'urne funéraire de René Dumont, avec des archives précieuses. Ce retour des cendres (sans cendres, déjà dispersées) fut, au matin glauque à Roissy, assez différent de celui réservé à Napoléon. L'époque est à la panique. Et pourtant.

Chaque jour apporte des chiffres irréels, tandis que les uns et les autres courbent la tête en attendant que la mitraille redescende, fauche les masses. Drôle de paix. L'économie est décidément une croyance. Croyance, par psychologie collective, dans un fonctionnement qui n'est qu'un choix convenu. Croyance dans son caractère inéluctable.

Le retour non seulement au local mais à l'individuel montrera que chacun peut peser sur le cours global, comme pour l'information. La confiscation par quelques-uns du destin de milliards d'individus n'est qu'une acceptation par ces milliards d'individus de ce diktat. Cela dessine une organisation qui refuse certes l'accumulation injuste et inefficace de l'argent (sans aucun sens et menant de plus à des périls écologiques), mais aussi le retour des vieilles conceptions étatiques et bureaucratiques. Nous n'en sortirons pas par plus d'Etat, mais par plus d'initiatives locales fédérées.

A chacun de reprendre en mains son destin à portée de vue, pour parler au monde. Une ère micro-macro s'ouvre.

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03 : 12 : 08

Nouvel économiste

A la demande générale, l'analyse parue dans Le Nouvel économiste du 30 octobre 2008, ou comment la crise financière pousse à oser publier des pensées différentes :

Pendant des siècles, des croyances successives ont voulu figer l’humanité dans un système clos, arrêté, prosélyte. Pourtant, nos sociétés sont hybrides. Les identités de chacun sont imbriquées. Il importe d’en tirer les conséquences en entrant dans une philosophie de la relativité, c’est-à-dire en concevant un devenir commun à cette planète, mais avec une infinité de modes de vie et de pensées : écologie culturelle. Cela signe le retour du local, des individus en réseau, fédérés, du global-éclaté, du politique au sens du choix de vie, et des savoirs.

 

 

 

La nouvelle organisation planétaire peut résulter de deux mouvements en apparence opposés : des périls obligeant à une gouvernance commune, à un pacte terrien évolutif ; le retour vers le local, les micro-marchés. Voilà bien d’ailleurs la dimension inédite d’Internet : surgissement d’un forum planétaire et mise en évidence de l’hyper-local pour tous. Cela signe la crise des intermédiaires avec une mise en cause des systèmes d’information, incitant non seulement à des échanges équitables mais aussi à des éthiques d’entreprises.

 

 

 

Alors, contre la double erreur d’une vision standardisée de l’économie globale pour toute la planète dans une hyper-consommation suicidaire et celle de la décroissance, il existe une autre vision pragmatique : des croissances diversifiées pour des modes de vie variés. Voulons-nous vivre à Paris, comme à Rambouillet, à Sidney comme à Dakar ? Pour réinventer le futur, la diversité devient un concept à inventer.

 

 

 

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24 : 11 : 08

réalité de la fiction

Nulle part ailleurs dans Paris humide. Au coin de la bibliothèque de l'Arsenal, lumière noire derrière les travaux, et une affichette pour Gaston Leroux. Mais c'est plus loin qu'il faut montrer chandelle blanche pour monter les escaliers d'une messe sombre. Quelques repris de littérature viennent toucher les pièces du mythe. Une fugitive exposition Lautréamont. Tout doit disparaître à minuit comme Cendrillon. Les Lefrère reçoivent. Jean-Jacques a réussit l'exploit de concevoir un album illustré (chez Flammarion) sur l'auteur le plus fugitif, caché, de la littérature : Isidore Ducasse. Sous le signe de Leroux. Trace après trace.

L'envers de notre temps : des petits signaux pour une oeuvre totale. Au temps des biographies surexposées pour des pensées minimales, voilà un joli guide. Nous, très particuliers, recommençons à penser général. Occupons-nous des affaires du monde. 

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19 : 11 : 08

la confusion des sentiments

Tout s'entrechoque. Pire que Castaneda en vol plané mycologique. Pellaert, encore un disparu anonyme. Discret, modeste, gentil (très gros défaut en France), pour un art du kitsch, de l'excès. Je le mettais en valeur dans Les Sixties en 1996. Il était surpris. Forest aussi : des originaux de leurs dessins dans un musée... Des couvertures de leurs albums en images génériques à admirer, avec Losfeld : Pravda, Barbarella, Jodelle.

D'une façon générale, il doit exister un masochisme inavoué à rester en France. Ce pays humilie, rabaisse, occulte systématiquement ses individualités brillantes, par conservatisme mandarinal ancré, esprit cire-bottes/pas de vagues, poigne de fer de petits potentats médiocres. Seuls le gâtisme ou la mort permettent de transfigurer le végétal désespéré en héros posthume. Certes, trop d'honneurs pourrit, mais trop d'ingratitude systématique use. Pays d'esprits sénescents.

Sinon, pour parler de plus intéressant que cet aveuglement général, le bonheur de découvrir Aline Kominsky Crumb, qui n'est pas juste Madame Crumb. Son livre Need more love. A Graphic Memoir est épatant, comme disait Renoir dans La Règle du jeu, mêlant textes, dessins, photos. Trouvable chez BD Spirit (69 rue Labat, 75018 Paris). Faut connaitre. C'est fait.

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