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29 : 01 : 10 |
 Réinventer l'avenir ! |
(avec un clin d'oeil amical à Aminata Traoré à Bamako)
Deux signes doivent nous alerter : l’Appel pour une République multiculturelle et postraciale ; le lancement de l’année Utopies & Innovations. La France serait-elle enfin apte à sortir de son torticolis passéiste et de penser le monde en transformations, de laisser émerger des générations nouvelles, de permettre des lectures prospectives des événements ?
Il serait temps. Cela permettrait de donner un autre sens à nos débats récents autour de l’histoire, la mémoire, l’identité. En effet, ayant circulé au Laos, en Mongolie, au Japon, au Mali et en Inde, les controverses sur l’identité nationale, le musée d’histoire de France ou la suppression (sectorielle) de l’enseignement de l’histoire, paraissent vraiment étranges. Des contrées aux peuplements composites et à la grande diversité de langues comme l’Inde ou le Mali ne se les posent pas. Des pays d’immigration, telle la Nouvelle-Zélande (où les Maoris sont eux aussi des immigrés tardifs), vivent en tournant leur regard vers l’avenir.
L’histoire est partout, quand elle se voit contestée et canalisée par des « barrières mémorielles ». Pourtant, comment pouvons-nous vivre et choisir sans connaissance du passé collectif ? Et n’est-il pas temps, comme ailleurs dans le monde, d’avoir une vision prospective de ce passé ?
Connaître le local et accepter la multidiversité en mouvement
Lorsque beaucoup tentent d’instrumentaliser le passé avec le devoir de mémoire, qui est de fait souvent l’affrontement des mémoires, il devient urgent de proclamer un besoin d’histoire général. Cette histoire ne doit cependant pas être une reconstitution à posteriori du chant national mêlant rois et dirigeants, ni la glorification de l’émancipation du peuple, ni une succession de repentirs anachroniques. Le Mallet et Isaac est mort, comme la geste communiste. L’histoire est une reconstruction problématique du passé.
Sur quelle base ? Le travail historique n’échappe évidemment pas aux demandes sociales et aux modes intellectuelles. L’urgence actuelle semble constituée d’abord par le besoin de chronologie longue car tout s’accumule avec la même actualité sur les écrans. La seule réponse logique et légitime devient celle d’une histoire-territoire. Le territoire national actuel possède en effet une histoire longue. Qui pourra contester que chaque individu passant sur ce territoire ou habitant ce territoire n’ait utilité à savoir son passé ? Il peut être rappelé, depuis les premiers peuplements humains, en grandes étapes jusqu’à aujourd’hui. Constatons-le, tout autre démarrage chronologique (Gaulois, Romains, Francs…) prêterait à contestation comme une option idéologique.
De ce fait, la chronologie longue conduira inévitablement à traiter des variantes locales (l’histoire de ma ville et ses spécificités) et de grands mouvements européens et mondiaux (Rome excède le territoire national). Cette histoire-territoire se projette ainsi du local au global. Les explorations et les colonisations le nécessitent quand la France aujourd’hui résonne territorialement sur plusieurs continents et que le français se parle dans un nombre de pays conséquent dans le monde (voir Haïti).
L’histoire-territoire ne peut donc être qu’une histoire stratifiée. Elle se complète naturellement par des repères concernant l’évolution longue de chaque continent. Qui niera aujourd’hui, à l’heure du commerce globalisé, le caractère indispensable de notions sur l’histoire longue de la Chine, de l’Inde, des différentes parties de l’Afrique ou de l’Amérique, de l’Australie ? Nos enfants, quels qu’ils soient, doivent bénéficier de ces repères, aptes, de plus, à encourager les échanges dans les classes et à les souder dans un contexte de multidiversité en mouvement.
Au Mali, en pays dogon, l’enseignement démarre en dogon avec des récits locaux, puis il s’ouvre au national et à l’international, apprenant aux enfants des savoirs universels et l’histoire d’autres continents (France et Europe, par exemple). Cette histoire stratifiée, du local au global, est ainsi indispensable partout sur la planète.
Elle participe d’un combat du savoir fondamental. La manipulation des individus, leur esclavage mental ou physique, sont en effet portés par l’ignorance et l’acculturation. Il faut alors impérativement défendre les savoirs locaux, les cultures et langues en perdition, en les associant à des outils de compréhension plus large.
Besoin d’histoire, oui, ici et partout, pour construire une planète diverse et solidaire. La relativité est là : émiettement et forum planétaire.
Identités imbriquées et sociétés des spectateurs-acteurs
Mais comment propager cette histoire ? Quels outils ? Pour quels effets ?
Je l’ai démontré depuis trente ans à travers de nombreux ouvrages (L’homme planétaire ou Pour une philosophie de la relativité), nos identités sont imbriquées. Elles sont liées à un passé variable suivant les individus et des influences de croyance et de goût : être catalan, espagnol, juif, passionné de culture japonaise et pratiquant intensivement le tennis. C’est justement parce que ces identités sont imbriquées que le fait de recevoir dans l’éducation des repères sur le passé local et global devient de plus en plus important.
Dans un contexte multiculturel et postracial ? Certes. Mais qui ne signifie pas pour autant le brouillage du sens et l’uniformisation générale. Par la connaissance, par des connaissances du local au global, l’individu doit pouvoir choisir et changer, bâtir localement en prenant des solutions singulières et parler mondialement en triant entre le rétro et le futuro, en expérimentant toujours dans une conception de l’histoire perpétuellement évolutionniste. Ce singulier-pluriel permet de comprendre des enjeux planétaires et de diversifier les diversités sans imposer de « moules » figés. C’est la lutte de celles et ceux qui veulent la pluralité de modèles en mouvement et les tenants d’un système unique bloqué. Notre temps, qui n’est plus la société du spectacle avec télévision unique à consommer passivement mais les sociétés des spectateurs-acteurs en réseau, le permet.
Voilà pourquoi il est difficile, par exemple, de comprendre l’hostilité à la création d’un musée d’histoire de France. Certes, le nom de Maison d’histoire en France lèverait toutes les équivoques. Mais pouvons-nous critiquer une initiative sans en connaître le contenu, alors que nos voisins allemands ont paisiblement ouvert le Deutsches Historisches Museum à Berlin ? Est-il illégitime de donner à chacune et à chacun à la fois des repères chronologiques concernant l’aventure humaine de son territoire et d’interroger toutes ses correspondances avec le reste du monde ? Vaut-il mieux multiplier des musées spécifiques, au risque de l’instrumentalisation, qui n’auraient aucun lieu de synthèse ?
D’autant qu’associant les musées français et travaillant avec des institutions internationales, un tel lieu pourrait utilement devenir une tête de réseau (rappelons que notre pays a porté l’Association internationale des musées d’histoire, le Conseil européen et le Conseil français des musées d’histoire). Il permettrait de plus d’aider à valoriser la recherche française –notre pays a toujours été en pointe dans ce domaine--, jusque dans ses aspects novateurs (l’histoire culturelle ou l’histoire du visuel), en l’associant à la recherche internationale. C’est en effet un nouveau souffle qui est nécessaire aujourd’hui, tant concernant les objets d’études, que l’appel au comparatisme et aux travaux sur les circulations, confrontations, influences. Dans ce cadre, la construction du niveau national sera un aspect essentiel, mais replacé naturellement en rapport avec des histoires locales, continentales et mondiales. Nous comprendrons mieux nos spécificités, les fondements de notre vivre-en-commun et les messages universalistes que ce pays a pu porter et --souhaitons-le-- porte encore.
Le besoin d’histoire s’avère en effet d’autant plus patent que nous vivons une crise de l’ethnologie, du moins dans ses formes les plus décalées du contemporain. Certes, la mise à plat anthropologique des structures sociales a eu le mérite de briser la barrière hiérarchique entre Europe et reste du monde (souvent colonisateur et colonisé), en faisant comprendre la relativité des situations sur chaque continent et en commençant à imposer un respect mutuel. Mais actuellement, du Mali ou du Brésil, des voix s’élèvent pour faire comprendre que cette démarche a eu aussi l'inconvénient de figer le regard sur les sociétés d’autres continents (ou d’ailleurs les campagnes européennes). Partout, il importe alors d’affirmer que ces peuples ont une histoire, bien antérieure à leurs premiers contacts avec les Européens et qu’ils continuent à évoluer considérablement au temps du téléphone portable en pays dogon islamisé. Autant l’écologie culturelle devient fondamentale pour défendre les diversités, autant il est inadmissible d’enfermer des territoires entiers dans une sorte d’Age d’or folklorique factice --pour les villages français ou les Bambaras. L’histoire-territoire longue devient nécessaire partout.
Pour toutes ces raisons, à l’heure où des signes annoncent un réveil salutaire, le besoin d’histoire doit mobiliser de nouveaux outils et aider à bâtir des travaux historiques qui aident à la fois à connaître le passé long, mais aussi à mieux discerner le monde d’aujourd’hui en mutation profonde. Voilà ce qui pourra lutter le mieux contre les dangers d’uniformisation planétaire par une consommation acculturée de pacotilles. Oui, de plus en plus, nous avons besoin d’histoire pour exister, choisir, nous définir. D’une histoire qui transforme ses outils et ouvre ses champs d’étude. D’une histoire promue par des lieux et des échanges inédits.
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14 : 01 : 10 |
 inutilité médiatique et propagande caritative |
[écrit à "chaud" le 14 janvier 2010, cet article d'humeur a plutôt été confirmé par les faits]
Ouvrons les perspectives. Permettons de vrais débats. D'accord ou pas d'accord, voilà un regard pluro-futuro à citer, à diffuser :
Haïti, comme toutes les catastrophes à venir (et passées, tel le tremblement de terre en Algérie où j'étais en 2003), ne peut que susciter de l'émotion et de l'empathie pour une population tellement accablée par des épreuves successives.
C'est dit et c'est beaucoup. Du point de vue de l'information, nous savons que les journalistes vont arriver en retard. Ils n'auront rien à nous apprendre sinon radoter sur les souffrances et hurler à chaque réplique pour maintenir le suspens, susciter le lacrimal et la colère, attendre des émeutes et des pillages. Ils lutteront contre la sagesse immémoriale des peuples, celle qui rejoint le constat scientifique : la catastrophe est aussi plausible que la non-catastrophe. Disons-le, qu'ils restent chez eux, cela fera des économies et imposera une règle de décence face à la compétition et aux surenchères du news market.
Du côté des organisations internationales, nul doute que leurs interventions sont nécessaires, car tout manque et tout est déstructuré. Mais nous allons assister à un ballet politique où chacun vient se montrer sans grande cohérence pour étaler son logo dans une surenchère indécente et inefficace. Il vaudrait mieux que l'ONU (ou autre organisme plus opérationnel) analyse vite les besoins d'urgence, puis ceux sur le long terme. Ensuite, les organisations les mieux adaptées seraient associés en fonction de cette analyse. Les autres resteraient chez elles.
Enfin, de quoi pourraient nous parler les médias ? Probablement de l'histoire longue d'Haïti, pas comme un pis-aller au manque de matière du sensationnalisme. Oui (voir le "regard" précédent), nous avons besoin d'histoire, d'une histoire du local au global, d'une histoire qui nous explique nos liens avec Haïti.
Les médias pourraient aussi nous parler du futur, de l'après désolation, de la réorganisation nécessaire pour que ce pays puisse disposer d'une économie autre qu'assistée-détournée par prévarication, pour saisir les questions écologiques à bras le corps, pour permettre la vie et le rayonnement d'intellectuels et d'artistes auxquels seul souvent l'exil devient le moyen de la survie.
Il n'existe pas de malédiction haïtienne.
Cependant, je détesterais qu'une telle réflexion aboutisse à une condamnation banale des médias, de l'aide internationale ou de l'écologie. Précisons alors les vrais combats à mener : pas de polarisation médiatique mais défense de la diversité médiatique, pas d'hystérie de l'écologisme mais une écologie critique, pas de religion caritative mais des aides pragmatiques évaluées.
Et puis, en ces moments, je pense à Hervé Télémaque.
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08 : 01 : 10 |
 Rétromonos contre plurofuturos ! |
Les bouleversements provoquent des raidissements. Au XXIe siècle, la France s'agrippe à la panoplie nationale du XIXe siècle, en oubliant les messages universalistes de la fin du XVIIIe. De quoi a-t-on peur ? De la pluralité ? Et est-on moins français quand on s'active du local au global ?
Partout, l'avancée des idées incite à défendre les pluralistes contre les monomaniaques. Non, nous ne voulons pas un monde uniforme mais un monde pluriel. Non, la nation ne résume nullement une aventure collective nommée France --ce qui fait rire quand ce surnationalisme est porté par des descendants d'immigrés ou issus d'autres territoires. Non, les transformations de la vie quotidienne ne doivent et ne peuvent être uniques, ni l'écologie écarter la critique, ni les relations mondiales oublier les pensées variées. Non, la production capitaliste standardisée ne peut demeurer un modèle unique face à ses échecs moraux et environnementaux, quand les situations multiples appellent des évolutions diversifiées. Non le "progrès" n'existe pas, quand il s'agit d'une notion relative sans modèle unique ni histoire arrêtée, à évaluer constamment à partir de partout (renverser et mixer les points de vue), et à inscrire dans des co-évolutions diversifiées au sein de mouvements perpétuels. Non, l'idée d'une religion unique n'est nullement tolérable, sans l'acceptation du refus de la religion ou de croyances différentes. Non, l'hygiénisme et l'idéologie de la durée ne sont nullement valables, quand chacun, par la connaissance, doit pouvoir choisir ses comportements --et changer.
Le pluralisme est un message d'avenir et un combat à mener sans relâche, par-delà la vanité de chicaneries obsolètes. Voilà le grand enjeu du futur.
Suivant ce regard inédit et notre nouvel esperanto en "o", il va falloir raconter la saga des monos contre les pluros, comme d'ailleurs celle des rétros contre les futuros (allez voir les résultats de 30 ans de réflexions sur ces sujets dans la partie "livres" ou "films") : rétromonos contre plurofuturos...
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30 : 12 : 09 |
 ! relativo 2010 relativo ! |
En novembre, je sortais de Tombouctou pour plonger dans les dunes du Sahara en guettant les caravanes au soleil couchant. Fin décembre, je hante nuitamment le cimetière de Pont-l'Abbé-d'Arnoult (pays des mojettes en Charente) et m'éblouis au mot de "TEMBOCTOU" sur la stèle de René Caillié.
Nous entrons dans une année "relativo", une année du local-global, une année où il va enfin falloir que les médias généraux brisent leur banquise et rendent compte de tout ce qui émerge. Pensée relativo, philosophie du relatif. Partout, des expressions variées apparaissent qui se sont emparées des techniques nouvelles. Avec les "0" de cette année à mammelons, allons donc nous amuser à lancer des mots rollers, des mots motos, des mots culbuto : rétro-futuro, singulo-pluro, ecolo critico, cinema-espresso...
Relativo, relativo, faisons foisonner les idées, au diable les slogans uniques au temps des spectateurs-acteurs partout : comparatisme, histoire stratifiée, évolutions diversifiées, identités imbriquées. Bientôt, nous irons à Tombouctou sur la tombe d'un Peul amateur de mojettes, chroniqueur en ligne de Pont-l'Abbé-d'Arnoult.
Post scriptum. On pourrait probablement appeler la trilogie de livres mis en ligne (Vers une écologie culturelle ; Un monde micro-macro ; Renverser le monde ) : Ici et partout. Trois étapes d'écologie critique pour planète mutante. Elle explique l'environnement au sens large, nos évolutions perpétuelles et le refus d'une norme, fût-elle idéale. Pas de planète globalisée, une planète relative, à la fois diverse et solidaire.
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17 : 12 : 09 |
 écologie critique, critique de l'écologisme |
L'écologisme bêlant est insupportable. J'ai insisté sur la nécessité d'une écologie culturelle, c'est-à-dire sur le fait de prendre en compte les individus et les cultures dans ce qui est aujourd'hui broyé par une machine de production de masse mondiale et pas seulement les dérèglements climatiques ou les pollutions et éradications concernant la faune, la flore, l'air, l'eau, la terre. Pensée d'ensemble permettant la reconstruction d'un vivre-en-commun fondé sur la diversification de la diversité à travers une philosophie de la relativité.
We are millions. Say you are plural. We understand a moving world, we need relativity and critical ecology !
Il faut maintenant insister aussi sur une écologie critique. L'impératif environnemental demeure fondamental (il suffit de voyager pour le constater). Ce n'est dons pas une critique de l'écologie qui importe --plutôt sa défense partout-- mais un refus de l'écologisme, de la religion de l'écologie, de l'écologie-écran aussi (repeindre en vert pour vendre comme avant), qui quitterait son lien nécessaire avec la science, l'expérimentation et le débat philosophique. Disons-le clairement, on peut être écologiste et comprendre la chasse, une certaine chasse. On peut avoir un souci du développement durable en refusant justement de figer des zones entières ou de préconiser une croissance négative : croissance durable signifie croissances diversifiées. Bref, l'écologie mourra le jour où elle oubliera sa dimension première, scientifique, et donc sa dimension critique et expérimentale. Vouloir imposer un seul modèle opératoire est voué à l'échec.
Alors, pour promouvoir ces idées qui se répandent malgré la pesanteur des machines-à-penser obsolètes, voici quelques nouveautés en ligne :
REGARDEZ, PROPAGEZ, FAITES SAVOIR !
Cinq films longs-métrages sont lancés sur des thèmes essentiels du monde aujourd'hui (allez voir dans "films") : concernant aussi bien les médias, les images globalisées, le caritatif, les pollutions et la refondation des modes de vie.
Un travail photographique --qui peut être exposé, projeté-- est visible dans "photos" : de l'anti-tourisme en Mongolie.
Un livre clôt une série de réflexions sur les transformations actuelles. Il est publié en ligne (ce qui, de fait, touche plus de monde que beaucoup de publications sur papier ; sans aucune hostilité au papier cependant ou à d'autres vecteurs) :
Après : L'Homme planétaire ; Pour une philosophie de la relativité ; Vers une écologie culturelle ; Un monde micro-macro ; une oeuvre se poursuit ainsi pas à pas :
RENVERSER LE MONDE. Chroniques du Laos, de Mongolie, de Paris et d'autres ailleurs "Ce livre charrie des réflexions sur notre monde en interactions, notre planète relative. Il raconte des identités imbriquées, toutes ces tensions micro-macro qui zèbrent les grandes villes ou des peuples jamais isolés. Il est une invitation à la curiosité, à la défense de l’écologie culturelle, à l’exercice critique et à des pensées réversibles. Oui, il est temps de renverser le monde, de regarder les cartes à l’envers, de se penser à partir d’ailleurs. Ce livre nous promène ainsi sur des routes différentes. Il plaide pour des co-évolutions, des informations multi-points de vue, en refusant les évidences du « progrès » et l’insolence des charity shows. Il ouvre ainsi les pistes de rapports sociaux et mentaux différents dans un monde mutant en réseau, celui d’individus singuliers-pluriels. A l'ère de la télévision, Guy Debord avait attaqué la "société du spectacle". Au temps d'Internet, voici l'émergence, dans la guerre mondiale médiatique, des spectateurs-acteurs."
Voilà, maintenant je vais me reposer, bientôt me taire et sûrement mourir.
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08 : 12 : 09 |
 Vivant |
Quand on revient asphyxié de cette immense poubelle polluée qu'est devenue l'Inde, on mesure l'urgence absolue d'arrêter les emballages plastiques, le crime multiple de la déforestation et le pétrole comme carburant. On tombe pourtant sur un hôpital de vaccination de masse pour un danger putatif (il faut écouler le stock de vaccins) et une psychanalyse collective sur l'identité nationale : décidément, notre grande maison de retraite va mal.
J'ai survécu à des milliers de kilomètres, à des soirs âcres de fumée et navigué sur la mer d'Oman, cloaque infâme : partout, le même constat. Alors, à l'heure de Copenhague, de la gesticulation tous azimuts et de l'écologie religieuse, le réchauffement climatique forme un des aspects des crises diverses à l'oeuvre, dont la moindre n'est pas l'acculturation de populations entières.
Certains de mes amis s'énervent de ce tsunami de bons sentiments intéressés. A juste titre. Mais ne faisons pas la fine bouche : si le climat incite à traiter d'autres questions de fond, tant mieux. Ainsi, le replâtrage hâtif d'un capitalisme financier infect, multipliant dans l'irréel les disparités, ne peut dissimuler la nécessité de refonder le vivre en commun, en prenant des exemples partout et en permettant des évolutions différenciées (abolir le diktat du modèle unique, évoluer toujours mais dans la variété des choix). De même, les saccages matériels et mentaux sur la planète sont si immenses et patents que seuls des salauds ou des crétins peuvent persister à nier la nécessité d'intervention immédiate.
Il faut en effet ne pas sortir de leurs lieux préservés pour rejeter l'idée d'une absolue urgence à organiser le travail autrement, les entreprises, les échanges locaux et globaux, et de fixer une priorité cardinale à l'impact environnemental. Salir la terre, la mer, mais salir les hommes aussi. L'environnement est un tout : écologie culturelle.
Ne soyons pas touristes, voyageons. Et changeons nos têtes. Bientôt un nouveau livre en ligne, une expo photo et l'annonce de cinq longs-métrages. Ouf.
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17 : 11 : 09 |
 Défaut d'identité ? |
Vous savez que je suis allé m'inverser la tête en écoutant des Maliennes et des Maliens pour un film décapant (ici avec le bonnet Dogon offert par le maire de Sangha). J'enchaîne en allant suivre, en images non commentées, des situations diverses en Inde. Retour le 7 décembre si tout va bien (et merci au passage à ces Net-visiteurs quotidiens du Japon ou de Vanuatu, des USA ou d'Egypte...). Expérience fortes, même si elles sont faites dans des conditions difficiles, qui sont un défi pour ma santé.
Alors, je retrouve Paris --que j'aime et que je hais tant-- en transit. Comment comprendre l'atmosphère dépressive et moisie de ce pays ? Ailleurs, les populations bougent, construisent, changent. Ici, trop gâté probablement et vieilli, tout le monde râle.
Je pense qu'il est urgent d'envoyer les Français et les Françaises travailler à l'étranger pour leur aérer l'esprit. Ils comprendront ce que j'ai théorisé depuis longtemps : nos identités imbriquées planétaires, qui ne s'annulent pas mais s'additionnent. Alors, ils aimeront être français comme les Dogons aiment être maliens, ils aimeront être parisiens, ils aimeront dialoguer avec la planète, comme dans le cyber-centre de Sangha. Ils évolueront dans leurs goûts et leurs habitudes, comme le font les Dogons.
Bref, ils ne se poseront plus de faux problèmes et sauront porter un regard lucide, local et universel.
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19 : 10 : 09 |
 Au pays des images hybrides |
Par monts et par vaux, par mers et par avions, par volcans et par ruisseaux. D'ici la fin d'année, je crapahute et filme. Quand je rentre et vois les visites quotidiennes de ce site, issues vraiment de tous les continents, cela m'encourage. Cinq longs métrages vont bientôt pouvoir circuler. Une exposition virtuelle (réelle bientôt ?) sera mise en ligne sur l'intrusion de la culture globale en Mongolie : de l'anti-photo touristique, de l'anti-pittoresque.
Et, la tête enturbanée de sommeil, les neurones frits carbonisés, je reviens du Japon. Belle surprise que celle d'une population courtoise partout et d'une société esthétique, raffinée, leçon de civilisation, cela me rappelle le Laos. Rieuse mais absolument pas violente. Voir le monde depuis le Japon ? Peut-être.
Etonnement aussi devant des traditions très fortes, insulaires : chacune ou chacun parle exclusivement japonais, même dans les jeunes générations et chez les dirigeants. Tout en produisant une culture mondialisée.
Hiroshima sans images. Le mangaka Tezuka invente Atom en copiant les super-héros du vainqueur. Maître Ibata nous reçoit pour une performance de calligraphie géante. Je dors pendant que le typhon passe. Nous parlons Ozu sur la tombe de Mizoguchi. Guy Debord bénéficie d'une rétrospective filmique à Tokyo juste quand j'y filme. Et Koji Morimoto, ce génie du dessin animé, m'entretient de son enfance en pleine nature.
Bref, un monde de métamorphoses. Pour de nouveaux gnômes planétaires ? Ou enfin des spectateurs-acteurs ?
Prochain épisode : Mali. Puis Inde. Pardonnez mon silence mais c'est pour la bonne cause et cela fait respirer la cervelle.
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11 : 09 : 09 |
 Renverser le monde |
RENVERSER LE MONDE. Chroniques du Laos, de Mongolie, de Paris et d'autres ailleurs est le livre que je viens d'achever à mon retour d'Ulaanbaatar. Il s'agit d'une réflexion, à partir d'observations de terrain, sur les transformations de la planète, ainsi qu'une invitation à changer de modèles et de méthodes, à modifier les repères et les points de vue. Je l'envoie à plusieurs éditeurs pour une parution en 2010, en même temps que la sortie des 5 longs métrages.
En effet, la fin d'année est chargée, puisque j'enchaîne des tournages au Japon, au Mali et en Inde. 2010 sera l'année "Utopies & Innovations" avec la Métropole Rhin-Rhône. Des réjouissances en perspectives et l'espoir de redonner du mouvement à l'imaginaire en balayant les vieux grincheux et les vieilles grincheuses surmédiatisés du siècle passé : la démission de l'impuissance geignarde pour pérenniser son pouvoir sénescent. Mais il n'en est pas partout ainsi dans le monde, heureusement.
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21 : 07 : 09 |
 Jackson again and Laos |
Une réaction vive sur ce site concernant Michael Jackson et beaucoup de visites des Etats-Unis. Le Michael bouge encore décidément. Cela dit, le tapage médiatique genre récupération obamesque et le regain de ventes de disques ont plutôt tendance à conforter mon sentiment : ce pantin de l'industrie musicale était déjà mort en étant vivant.
Au Laos, dont je reviens pour cause de tournage d'un film (Se nourrir) sur la défense des cultures vivrières dans les régions de l'extrême nord aux populations animistes (Yaos, Kheus), la sérénité bouddhiste générale rend le MJ invisible. En pleines montagnes et forêts de mousson, un jeune chef yao a eu cette superbe expression : "Je n'ai rien à dire sur ce que je ne vois pas !" C'est-à-dire : je ne suis pas en mesure de juger de ce que je ne perçois pas directement. Imaginons toutes les populations de la Terre reprenant le principe, mais c'est l'écroulement immédiat des publicités et des propagandes !
Rassurons-nous, la plupart des gens croient d'abord à ce qu'ils ne voient pas. D'ailleurs, je vous envoie une photo qui ne vient pas de chez les Yaos mais des environs de Vientiane. Les images mentent ? Bref, je démarre un nouveau livre de réflexions-voyages, que je finirai en Mongolie (août-septembre).
P.S. Nous venons au passage de vivre le décès de la télévision : naissance en 1948 avec le premier journal télévisé sur CBS - mort en 2009 avec la disparition de Walter Cronkite, l'anchorman emblématique. Vive les webtv !
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