08 : 12 : 09

Vivant

Quand on revient asphyxié de cette immense poubelle polluée qu'est devenue l'Inde, on mesure l'urgence absolue d'arrêter les emballages plastiques, le crime multiple de la déforestation et le pétrole comme carburant. On tombe pourtant sur un hôpital de vaccination de masse pour un danger putatif (il faut écouler le stock de vaccins) et une psychanalyse collective sur l'identité nationale : décidément, notre grande maison de retraite va mal.

J'ai survécu à des milliers de kilomètres, à des soirs âcres de fumée et navigué sur la mer d'Oman, cloaque infâme : partout, le même constat. Alors, à l'heure de Copenhague, de la gesticulation tous azimuts et de l'écologie religieuse, le réchauffement climatique forme un des aspects des crises diverses à l'oeuvre, dont la moindre n'est pas l'acculturation de populations entières.

Certains de mes amis s'énervent de ce tsunami de bons sentiments intéressés. A juste titre. Mais ne faisons pas la fine bouche : si le climat incite à traiter d'autres questions de fond, tant mieux. Ainsi, le replâtrage hâtif d'un capitalisme financier infect, multipliant dans l'irréel les disparités, ne peut dissimuler la nécessité de refonder le vivre en commun, en prenant des exemples partout et en permettant des évolutions différenciées (abolir le diktat du modèle unique, évoluer toujours mais dans la variété des choix). De même, les saccages matériels et mentaux sur la planète sont si immenses et patents que seuls des salauds ou des crétins peuvent persister à nier la nécessité d'intervention immédiate.

Il faut en effet ne pas sortir de leurs lieux préservés pour rejeter l'idée d'une absolue urgence à organiser le travail autrement, les entreprises, les échanges locaux et globaux, et de fixer une priorité cardinale à l'impact environnemental. Salir la terre, la mer, mais salir les hommes aussi. L'environnement est un tout : écologie culturelle.

Ne soyons pas touristes, voyageons. Et changeons nos têtes.

Bientôt un nouveau livre en ligne, une expo photo et l'annonce de cinq longs-métrages. Ouf.

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17 : 11 : 09

Défaut d'identité ?

Vous savez que je suis allé m'inverser la tête en écoutant des Maliennes et des Maliens pour un film décapant (ici avec le bonnet Dogon offert par le maire de Sangha). J'enchaîne en allant suivre, en images non commentées, des situations diverses en Inde. Retour le 7 décembre si tout va bien (et merci au passage à ces Net-visiteurs quotidiens du Japon ou de Vanuatu, des USA ou d'Egypte...). Expérience fortes, même si elles sont faites dans des conditions difficiles, qui sont un défi pour ma santé.

Alors, je retrouve Paris --que j'aime et que je hais tant-- en transit. Comment comprendre l'atmosphère dépressive et moisie de ce pays ? Ailleurs, les populations bougent, construisent, changent. Ici, trop gâté probablement et vieilli, tout le monde râle.

Je pense qu'il est urgent d'envoyer les Français et les Françaises travailler à l'étranger pour leur aérer l'esprit. Ils comprendront ce que j'ai théorisé depuis longtemps : nos identités imbriquées planétaires, qui ne s'annulent pas mais s'additionnent. Alors, ils aimeront être français comme les Dogons aiment être maliens, ils aimeront être parisiens, ils aimeront dialoguer avec la planète, comme dans le cyber-centre de Sangha. Ils évolueront dans leurs goûts et leurs habitudes, comme le font les Dogons.

Bref, ils ne se poseront plus de faux problèmes et sauront porter un regard lucide, local et universel.

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19 : 10 : 09

Au pays des images hybrides

Par monts et par vaux, par mers et par avions, par volcans et par ruisseaux. D'ici la fin d'année, je crapahute et filme. Quand je rentre et vois les visites quotidiennes de ce site, issues vraiment de tous les continents, cela m'encourage. Cinq longs métrages vont bientôt pouvoir circuler. Une exposition virtuelle (réelle bientôt ?) sera mise en ligne sur l'intrusion de la culture globale en Mongolie : de l'anti-photo touristique, de l'anti-pittoresque.

Et, la tête enturbanée de sommeil, les neurones frits carbonisés, je reviens du Japon. Belle surprise que celle d'une population courtoise partout et d'une société esthétique, raffinée, leçon de civilisation, cela me rappelle le Laos. Rieuse mais absolument pas violente. Voir le monde depuis le Japon ? Peut-être.

Etonnement aussi devant des traditions très fortes, insulaires : chacune ou chacun parle exclusivement japonais, même dans les jeunes générations et chez les dirigeants. Tout en produisant une culture mondialisée.

Hiroshima sans images. Le mangaka Tezuka invente Atom en copiant les super-héros du vainqueur.  Maître Ibata nous reçoit pour une performance de calligraphie géante. Je dors pendant que le typhon passe. Nous parlons Ozu sur la tombe de Mizoguchi. Guy Debord bénéficie d'une rétrospective filmique à Tokyo juste quand j'y filme. Et Koji Morimoto, ce génie du dessin animé, m'entretient de son enfance en pleine nature.

Bref, un monde de métamorphoses. Pour de nouveaux gnômes planétaires ? Ou enfin des spectateurs-acteurs ?

Prochain épisode : Mali. Puis Inde. Pardonnez mon silence mais c'est pour la bonne cause et cela fait respirer la cervelle.

 

                                                              

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11 : 09 : 09

Renverser le monde

RENVERSER LE MONDE. Chroniques du Laos, de Mongolie, de Paris et d'autres ailleurs est le livre que je viens d'achever à mon retour d'Ulaanbaatar. Il s'agit d'une réflexion, à partir d'observations de terrain, sur les transformations de la planète, ainsi qu'une invitation à changer de modèles et de méthodes, à modifier les repères et les points de vue. Je l'envoie à plusieurs éditeurs pour une parution en 2010, en même temps que la sortie des 5 longs métrages.

En effet, la fin d'année est chargée, puisque j'enchaîne des tournages au Japon, au Mali et en Inde. 2010 sera l'année "Utopies & Innovations" avec la Métropole Rhin-Rhône. Des réjouissances en perspectives et l'espoir de redonner du mouvement à l'imaginaire en balayant les vieux grincheux et les vieilles grincheuses surmédiatisés du siècle passé : la démission de l'impuissance geignarde pour pérenniser son pouvoir sénescent. Mais il n'en est pas partout ainsi dans le monde, heureusement.

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21 : 07 : 09

Jackson again and Laos

Une réaction vive sur ce site concernant Michael Jackson et beaucoup de visites des Etats-Unis. Le Michael bouge encore décidément. Cela dit, le tapage médiatique genre récupération obamesque et le regain de ventes de disques ont plutôt tendance à conforter mon sentiment : ce pantin de l'industrie musicale était déjà mort en étant vivant.

Au Laos, dont je reviens pour cause de tournage d'un film (Se nourrir) sur la défense des cultures vivrières dans les régions de l'extrême nord aux populations animistes (Yaos, Kheus), la sérénité bouddhiste générale rend le MJ invisible. En pleines montagnes et forêts de mousson, un jeune chef yao a eu cette superbe expression : "Je n'ai rien à dire sur ce que je ne vois pas !" C'est-à-dire : je ne suis pas en mesure de juger de ce que je ne perçois pas directement. Imaginons toutes les populations de la Terre reprenant le principe, mais c'est l'écroulement immédiat des publicités et des propagandes !

Rassurons-nous, la plupart des gens croient d'abord à ce qu'ils ne voient pas. D'ailleurs, je vous envoie une photo qui ne vient pas de chez les Yaos mais des environs de Vientiane. Les images mentent ? Bref, je démarre un nouveau livre de réflexions-voyages, que je finirai en Mongolie (août-septembre).

P.S. Nous venons au passage de vivre le décès de la télévision : naissance en 1948 avec le premier journal télévisé sur CBS - mort en 2009 avec la disparition de Walter Cronkite, l'anchorman emblématique. Vive les webtv !

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26 : 06 : 09

A-t-on le droit... ?

Je m'interromps dans le tournage d'un long métrage (passionnant mais en un temps record) sur la fabrique de l'info pour bouillir en direct.

A-t-on le droit de considérer Michael Jackson, le jour de sa mort, davantage comme un phénomène de foire (un "freak") que comme un personnage important de la musique pop ? Entendre à la radio de bon matin qu'il est le plus grand : vraiment n'importe quoi. Il n'a rien composé, n'a rien inventé. Sa musique est aussi répétitive et formatée que toute la vague soul ou disco (cela peut durer des heures...) Merci Quincy Jones.

Ce pauvre garçon, à la vie sûrement malheureuse, a été balloté entre sa famille show biz (Jackson Five) et son exhibition composée, repeint en blanc, cherchant ses couilles sur scène. Il exprime parfaitement le formatage complet d'un produit de vente. Michael est une barre chocolatée à haute rentabilité. Contrairement aux Beatles, aux Stones, à Dylan, qui bousculaient la musique et les idées, il est à l'origine seulement de chiffres de vente. C'est l'icône de l'industrie du disque triomphante.

J'espère qu'il n'y aura plus de Michael Jackson.

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07 : 06 : 09

inconnu comme Gébé...

 

Vivre avec exigence consiste à perpétuellement se questionner et se redéfinir. Dans nos sociétés de l'ubiquité, il faut faire des choix et se méfier de celles et ceux qui n'ont aucun repère, aucune admiration (ni aucune haine d'ailleurs), les consommateurs passifs ou les égocentrés de petit acabit.

Vous ne connaissez pas Gébé ? Vous gagneriez à le fréquenter --malheureusement à fréquenter ses traces aujourd'hui-- et je vous conseille les "Papiers à lettres" rassemblés par Frédéric Pajak chez Buchet-Chastel. J'aurais aimé faire ce livre : voilà du travail courageux. Gébé ne se vend pas --et après. Quelques personnes savent, savent l'importance du dessinateur et de l'écrivain, et la qualité de l'individu. J'ai eu la chance de le côtoyer (par éclairs) et de lui glisser (comme à Topor) combien j'admirais son écriture. Ouf, il faut parler aux vivants. Il me reste quelques mots amicaux dont je suis fier.

Gébé, dans l'époque de la surabondance, pose le rare. Gébé, au temps de la durée pour la durée grabataire, nous interroge sur l'intensité. Gébé, quand tout se mesure au hit-parade de l'industrie du goût moyen, tranche par l'exigence.

Gébé, discret, timide, est un fanal. Disons-le, il vaut mieux être inconnu comme Gébé que connu comme... (remplissez les points, peu importe).

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06 : 06 : 09

pensées génératrices, pensées stériles

 

D'aucuns vont à nouveau me moquer comme "obamiste" quelconque. Il est vrai que le chic intellectuel consisterait à attaquer Obama en tant que nouveau représentant de commerce de la boutique USA en perdition sur le plan de l'image de marque --qu'il est aussi. Mais ce qu'il représente et ce qu'il dit (récemment au Caire sur l'Islam) résonne avec force. Chacun attend les actes et surveille l'efficacité (en finir avec cet imbécile et dramatique conflit israëlo-palestinien, trop médiatisé, d'un autre âge, qui sert les intérêts de quelques-uns dans chaque camp pour des chantages financiers, dont tout le monde a souffert et dont aucun gagnant ne peut sortir).

Au moment des élections européennes, l'heure est au local-global, au micro-macro, plus à ces nationalismes du XIXe siècle qui ont montré leurs limites et souvent leurs crimes. Ce qui ne veut pas dire qu'on refuse un attachement à la France ou aux Etats-Unis, mais qu'il est un élément de nos divers attachements (montmartrois, parisien, laïque, européen, passionné de culture japonaise...que sais-je ?).

Pour la pensée, c'est la même chose. Il est des pensées génératrices et des pensées stériles. A Colleville, Obama décrit, par opposition au combat frontal contre l'idéologie nazie, le temps actuel de la relativité, de la diversité des points de vue. Il se situe ainsi du côté d'une pensée génératrice d'un nouveau monde --et rend vieux beaucoup d'autres (ou brouillons certains de tendance "attrape-tout", sans ligne claire).

Ce fut le cas du Sartre existentialiste (par opposition à Cioran, brillant dans l'impasse). Voyant aujourd'hui comment on sort de son bocal rochelais Paul Virilio dès qu'un avion se crashe, je suis fasciné par ces personnages (ce fut le cas de Baudrillard aussi avec son "simulacre") répétant la même chose de livre en livre, sur des idées pas très originales (oui, le monde va plus vite, depuis les années 1930 en fait ; oui, les dangers de catastrophes sont plus importants, entre ère atomique et ère des pollutions sans compter les inévitables catastrophes naturelles ou pas). Pour moi, ce sont des pensées totalement stériles, incapables d'imaginer de nouvelles sociétés, de nouveaux comportements, le monde en mouvement. Torticolis rétro.

Alors, Obama est frêle. Il n'est pas si puissant. Mais des millions d'individus gardent le pouvoir de faire, de faire déjà localement et de faire savoir. La grande aventure du devenir reste ouverte. Nous ne sommes pas seulement dans un grand hôpital de vieillards aigris.

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02 : 06 : 09

News market

 

Décidément, je me fais l'effet d'un vieux râleur (ce que je déteste, porte ouverte aux vieux cons de Roland Topor). Pourtant, chez mon charcutier rebeu spécialisé en cuisine italienne, la radio claironne sur un accident d'avion en citant le nombre de Français, puis le nombre de bébés français, puis le nombre d'enfants français et de femmes françaises. Je fais rire tout le monde en disant que pour les médias une vie ne vaut pas une vie : il vaut mieux être national, bébé, puis enfant, puis femme, puis homme, et enfin il reste les étrangers...

Cela fait des heures que, sur un drame fatal, les journalistes nous serinent qu'ils ne savent rien et un Borloo tient l'antenne (ce matin encore) pour dire qu'il n'a rien à dire. C'est stupéfiant de crétinerie. Bientôt des cellules psychologiques pour télespectateurs ou auditeurs ?

Faut vendre. Un zombie bêta de bonne famille a trouvé, lui, une recette. Il regarde tout de haut, de très haut, et balance des purées de nouvelles affolantes depuis son nouveau magistère écolo. C'est suintant de bons sentiments. Ca sent le piège à financements. Tout le monde a déjà dit tout cela plus intelligemment et tant vont faire des travaux sur terrain qui posent de vraies questions. C'est du stalino-écologisme.

Sinon, je reviens de Tallinn et d'ex-zones de Baltique interdites au temps des Soviétiques. J'y reçois des bouffées de relativité : il n'existe pas de culture pure ; tous les dieux ont une histoire ; la coopération internationale doit être mesurée sur chaque petit territoire. Mon ami, Directeur du musée de la Croix-Rouge à Genève, nous raconte ses expositions critiques sur les shows caritatifs.

Je suis rassuré. Il existe encore un monde de la raison, un peuple du sens pratique, au-delà du business news totalement déconnecté. Nous, les regardeurs, voyons bien ce qui se trame. Stop aux montreurs de leurres ! Il est temps d'introduire la révolution de l'héritage partagé, de l'action éducative porteuse de chances variées, celle des valeurs diverses et des modes de vie, celle du changement du travail et de sa rémunération, celle d'une planète propre et équilibrée. 

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25 : 05 : 09

Changeons de concepts, tri sélectif des idées !

 

Bien avant Ben qui signait des paysages, les sultans de Dolmabace à Istanbul encadraient la mer. Je reviens de Turquie qui est, comme la France, un lieu stratégique fort, croisement nord-sud et est-ouest.

J'y ai vu des passages et des disparités. Cannes célèbre Haneke, un sujet vieux et rabâché, un cinéma fatigué, lourd, empesé. Beaucoup travaillent désormais pour un troisième âge de la pensée, grabataires accrochés au système qui tourne à vide. Rupture générationnelle, qui n'est pas juste celle de l'âge mais celle du mode de pensée : nous sommes écoeurés du rétro perpétuel. Donnons une bonne claque au XXe siècle et avançons.

Cette clarification est nécessaire partout. Quand Benjamin N. dit à Obama qu'il ne veut ni d'état palestinien, ni arrêter la colonisation des territoires palestiniens, les amis d'Istraël et du monde juif en général ont tout intérêt à appeler au boycott financier et politique de ce gouvernement totalement réactionnaire.

La pensée relative, que je promeus comme seule opérationnelle dans notre monde multipolaire, peut être ainsi claire et logique. Sur d'autres sujets, il n'est pas facile d'apporter des nuances. Je sens bien qu'il y a aujourd'hui un mépris du savoir et de la compétence, une peur des idées. C'est normal car tout a été mélangé par le monde médiatique avide de pensées pré-digérées. Et, dans la sphère de la recherche en France, comme parmi les défenseurs institutionnels des échanges culturels entre la France et l'étranger, nous n'avons pratiquement aucune demi-mesure. Soit il y a des gens passionnés qui travaillent sans moyens pour remuer ciel et terre --et qui, au passage, sauvent le système entier--, soit il se trouve des voleurs (et voleuses) d'argent public, totalement incompétents, qui détruisent en ne faisant rien, sinon illusion passagère.

Penser un monde nouveau, c'est clarifier, défendre le savoir et le travail, bannir la médiocrité gluante des esclaves, condamner les obscurantistes du passé, rouillés. Une nouvelle vague ? En tout cas, une nouvelle lucidité.

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