J'avais le choix : faire une thèse ou un livre. J'ai choisi le livre, même si Marc Ferro me poussait aussi à l'habiller en thèse. Ceci n'est pas la première édition (elle est enfouie chez moi et j'ai la flemme de chercher). On doit être à la cinquième version. L'éditeur y croyait moyennement (pas de filière, pas de public, pas de matière spécifique...) J'ai toujours fait des livres qui n'avaient aucun rayon en librairie. C'est terrible. Même mes amis n'en voyaient pas l'intérêt (pas chic, trop pédago et pratique...) Ce fut un très gros travail. J'ai fait des conférences aux Etats-Unis ou en Allemagne, où rien de semblable n'existe. Désormais, des traductions commencent. Mais être atypique et pluridisciplinaire se paie cher et longtemps. Par parenthèse, je proposais à Jean-Marie Cavada, président de La Cinquième (chaîne de télévision) naissante et censée être pédagogique, une émission de décryptage d'images de tous types. J'eus un coup de fil en mon absence (Noël 1994), puis plus rien et découvris "Arrêt sur images" de Daniel Schneiderman quelques mois après. J'écrivis à Cavada, pour recevoir une réponse embrouillée, gênée. Là, je compris la confiscation absolue par les journalistes de l'outil télévisuel. Deux autres expériences cuisantes, totalement semblables, suivirent à quelques années de distance. A la télévision désormais --contrairement aux débuts--, les journalistes parlent aux journalistes, même pour de la vulgarisation. Le spécialiste est un pantin non-payé, faire-valoir instrumentalisé et considéré comme emmerdant par principe. Nulle étonnement que la population, lorsqu'elle connait bien une question, soit totalement affligée par la manière dont elle est relatée. |